Renefer (1879-1957)
« Les Artistes sont des soldats, ils sont à la guerre, devant la guerre, dans la guerre, et ils n’ont que le souci de fixer ce qu’ils viennent de voir. J’en connais qui dessinent au fond des tranchées, sur le calepin qu’ils gardent précieusement dans la poche de leur capote, et qui, aussitôt au repos, dans l’abri où ils s’éclairent tant bien que mal d’une clarté douteuse, dans le cabaret où la lampe suspendue projette sa lumière obscure sur la table où ils s’accoudent, se hâtent, par le fusain, par la couleur, de donner une forme plus durable aux notes prises sur le talus de boue, près du créneau ».
« Le Salon de la Guerre », Gustave Geffroy, les Arts Français, 1917
Les différentes éditions du carnet de Renefer depuis 2004 - Pius de 12 000 exemplaires vendus.
Dans la presse :
"Le récit manuscrit de ce qu'il voit et vit ne se veut pas traumatisant; mais il n'enjolive pas la réalité de son quotidien et prépare sa petite fille à sa mort probable." PAGE des Libraires - Déc. 2013
" Et tous ces morts, non dits mais qu'on ne devine que trop bien. Ce fac-similé du carnet de l'artiste-soldat est un témoignage fort et vrai qui se passe de commentaires. Poignant." Le Telegramme - 10 nov. 2013
" [Renefer] y croque le visage des hommes qu'il croise, la préparation de la soupe, les pioupious au repos, la garde de nuit, les ruines parfois. Il le fait avec un talent, une pudeur, mais aussi une force d'évocation extraordinaire. Derrière les dessins d'un père à sa fille, on lit tout le désarroi d'un homme à la guerre.
...Le document est aussi touchant que précieux." Le Republicain Lorrain - 7 Hebdo - 10 nov. 2013
" Dessins sur le vif - Tout est très réaliste mais présenté sans brutalité" Le Quotidien du médecin - 21 nov. 2013
".. C'est bien cette intimité entre Renefer et sa belle petite Monde qui fait de ce bouleversant Carnet une œuvre unique et universelle."
"On voudrait tout citer, on voudrait tout montrer. on voudrait surtout prendre notre "petite Monde" à nous et feuilleter avec elle ce livre merveilleux."
"Avec le centième anniversaire de la mobilisation ,(nos petits enfants) seront assaillis de documents, les enseignants n'auront que l'embarras du choix. Mais je doute, qu'aucun n'égale en richesse humaine et donc en vérité profonde ce Carnet rédigé par un artiste à sa propre enfant." Geneviève Jurgensen - La Croix, 5 oct. 2013
" Qui se souvient de ce précieux document qui peut se révéler une approche lumineuse pour les jeunes écoliers que l'on veut initier à l'histoire de la Première Guerre mondiale à la veille de la célébration du centenaire du premier conflit général du XXe siècle? Aujourd'hui personne ne pourra dire que le carnet de poilu de Renefer [...] est resté un simple trésor d'archives. "
"Ses dessins en couleurs sont impressionnants et ses commentaires d'une lucidité redoutable. Il est un acteur et un témoin. Il vit les choses et les sait les retranscrire pour que les plus jeunes comprennent. "
"A noter encore que Raymonde la fille de Renefer, a été résistante pendant la Seconde Guerre mondiale. Le fruit d'une éducation humaniste? C'est possible." Hervé Chabaud - L'Union/L'Ardennais - L'histoire en rafale, 3 oct. 2013
Vidéo de présentation du Carnet de guerre écrit et illustré par Renefer pour sa fille Belle Petite Monde.
Le carnet, Belle Petite Monde, a été édité en facsimilé chez plusieurs éditeurs depuis 2004 (Somogy, Albin Michel, en français et traduit en anglais et polonais).
Adressé à sa fille de 8 ans, il s'agit d'un récit très particulier et unique constitué de trente saynètes de la vie quotidienne, chacune illustrée d'aquarelles indissociables du texte. Le père, soldat et artiste tente de retranscrire les réalités de la guerre, en passant par des descriptions de soldats en situation. Tantôt drôles, tantôt mélancoliques, puis graves, les saynètes traduisent toutes les émotions du récit. Il ne s'agit pas de montrer les horreurs de la guerre, mais de tenter d’expliquer comment on parvient à vivre dans un environnement aussi hostile. Ce journal humaniste est celui d'un artiste très proche de ses contemporains. Sa prouesse est de mêler sur quelques pages et avec une grande sensibilité, la vie de l'homme en guerre et l'intimité des liens entre un père et son enfant.
Document ou Monument ?
Les carnets de la Grande Guerre pour enseigner l’histoire à l’école primaire : l’exemple du carnet Renefer, Ed. Presses Universitaires de Caen, 2021, une publication de Dominique Briand, formateur en histoire-géographie à l’ESPE de l’université de Caen . Pour ce pédagogues universitaire, le carnet de guerre de Renefer demeure un témoignage incontournable dans l'apprentissage de la mémoire, un "document ou monument".
Renefer au coeur du concours "Les Petits Artistes de la Mémoire". Organisé par l' Education Nationale (EDUSCOL) et l'ONAC, avec le soutien de multiples partenaires clés, ce concours d'art et d'histoire est devenu national, pédagogique, civique et intergénérationnel.
Depuis 2006, 300 à 500 carnets sont réalisés par an dans le cadre de ce concours. Autant de classes et d’écoles investies. La source d’inspiration initiale des enseignants et centaine de milliers d’élèves est le carnet de Renefer. Pour ce concours mais aussi tout autre projet pédagogique sur la Grande guerre dans les classes primaires,
Renefer au cœur des études historiques et actualités pédagogiques post-Centenaires
Renefer dans "Illustrer l'Histoire"
BPTI, Book Practice & Textual Itinaries - 7
Presses universitaires de Nancy,
Editions Universitaires de Lorraine
Ce volume propose d'examiner ce qu'illustrer l'Histoire signifie et implique. L'ensemble des articles réunis ici offre un panorama à la fois varié et singulier de la manière ou des manières d'écrire l'histoire en images, du 18e au 20e siècle, en France, en Angleterre, en Russie ou encore en Colombie. Le témoignage de Renefer dans son carnet adressé à sa fille Belle Petite Monde fait ici l'objet d'une nouvelle analyse :
Renefer livre des éléments de la Grande Histoire qui font écho à un récit personnel, aux résonnances à la fois individuelles et universelles.
Renefer est mobilisé dans le 1er génie en 1914, il a 35 ans. L'ingénieur-artiste est chargé d'établir la topographie des champs de bataille. Sa formation d'architecte, son don d’observation et son coup de crayon sont les qualités requises pour réaliser au mieux ses missions sur le front. Son travail aide à la préparation du terrain (construction des ponts, des abris, des tranchées…) et contribue à établir une topographie du champ de bataille en liaison avec le service télégraphique et le service des photos aériennes (interprétation des relevés photographiques, reconnaissance du terrain, réalisation des plans, etc..). Les relevés constitués de nombreux plans, dessins et croquis sont destinés à l’état-major. Bien ententu, ils ne sont pas signés par leurs auteurs et nous ne possédons pas de traces de la production de Renefer.
En juin 1916, Renefer est détaché du Génie au bureau de dessin de l'État-major de la 72e DI (Division d'Infanterie). En février 1917, il est à la 20e section des secrétaires d'État-major et détaché à la 72e DI en qualité de topographe. Il devient caporal puis sergent dessinateur en 1918. Il reçoit la Croix de Guerre le 17 novembre 1918 pour avoir, comme "dessinateur à la STDI 72 – exécuté maintes fois de périlleuses reconnaissances dans les secteurs de La Woëvre, de Champagne, de l’Oise, de l’Aisne, se portant spontanément aux points les plus exposés pour exécuter les travaux et croquis relatifs à son service". Il est nommé lieutenant du 9e régiment des zouaves en 1918.
À côté de son activité militaire, Renefer a toujours crayons et carnets de croquis à la main. Directement dans les boyaux, depuis le front, à la manière d'un reporter de guerre, le soldat croque la vie de ses compagnons, leur solitude et leurs souffrances sur fond de campagne dévastée. Ce témoignage graphique de la guerre peut se diviser en trois catégories :
- une riche correspondance illustrée de dessins aquarellés ;
-des eaux-fortes et des lithographies commandées par des éditeurs soucieux de conserver et de transmettre les images du conflit ;
- de nombreux carnets de route témoignant de la vie de ses compagnons de guerre, de la transformation du paysage, de son annihilation.
Certaines de ces œuvres sont collectionnées par les connaisseurs et historiens et ont donné lieu à de nombreuses expositions dès 1917.
Elles sont aujourd’hui présentes en grand nombre dans les archives des musées de la Grande Guerre de Paris, La Contemporaine, Péronne, Verdun, Meaux, Québec...
En 1915, un premier éditeur, Gaston Boutitie, commande à Renefer deux albums d'eaux-fortes des batailles de Verdun et de la Somme. À tirage limité, ces portfolios sont intitulés "Sur le Front, 15 eaux-fortes d’après nature, Verdun, 1915-1916 " et "Pendant le Combat, eaux-fortes Originales d’après nature, Somme, 1916-1917".
Renefer ne fait pas de dessin préalable. Avec sa pointe, il grave directement les plaques de cuivre. Les dessins exécutés sur le vif, rapidement, décrivent des paysages animés ou dévastés ainsi que des scènes de la vie sur le front.
Un album de douze grandes lithographies intitulées Des Hauts-de-Meuse en Alsace a été réalisé au premier jour de la bataille de Verdun et édité en 300 exemplaires. Il est intégré, comme l'ensemble de ses gravures et quelques croquis de guerre, au Catalogue raisonné de 1918 de la collection Henri Leblanc, aujourd'hui La Contemporaine, aux Invalides à Paris.
Par la suite, après l'immense succès du Feu d'Henri Barbusse (1873-1935), Prix Goncourt 1916, Gaston Boutitie obtient l'accord de Flammarion pour sortir une première édition illustrée du Feu et sollicite Renefer. Imprimé en mai 1918 à seulement 300 exemplaires en grand format (30 x 25 cm), sur un très beau papier de Rives à la forme, ce magnifique ouvrage reste comme l'une des œuvres les plus marquantes de la Grande Guerre.
Gaston Boutitie envoie les plaques de cuivre afin que Renefer les grave depuis le champ de bataille :
« J’acceptais et exécutais 60 dessins gravés sur bois et 10 eaux fortes. J’avais évidement les sujets sous les yeux ! Je me souviens que, pour être tranquille, je travaillais dans les boyaux d’évacuation des tranchées. (Ryseler, Les Petits Formats, 1946).
Le texte est enrichi de 10 eaux-fortes à pleine page et de 76 gravures sur bois pour les bandeaux, culs-de-lampe et lettrines. Les eaux-fortes sont d'une grande finesse, les plans se succèdent grâce à des encres tantôt grises, tantôt noires. Les soldats sont croqués à tout moment de la journée : dans les tranchées, à l'arrière dans un paysage lavé par la pluie, debout les pieds campés dans la boue pour la corvée des pommes de terre, ou encore dans un abri à la lumière de quelques bougies. Les compositions permettent en un clin d'œil d'entrer dans les scènes réalistes croquées par un artiste partageant la vie des poilus.
M. Barbusse a montré ce qu’il a vu et M. Renefer aussi. Ce livre contient donc Deux Vérités qui marchent côte à côte, avec leur personnalité bien distincte, l’une en trois cents pages, l’autre en dix eaux-fortes et quatre-vingts bois ! (Noël Clément-Janin, brochure de présentation de l’édition Boutitie, 1918).
Au lendemain de la Guerre, en 1922, Renefer réalise des eaux-fortes fines et précieuses, pour Le Cabaret d’A. Arnoux (Ed. Lapina). Puis l’année suivante, ses gravures sur bois illustrent Gaspard de René Benjamin pour Fayard, le 1er numéro de la collection "Le Lire de Demain".
" Mon cher Hirsch,
Pluie – boue – pourriture
Du gris morne le jour
Un noir d’encre la nuit.
Dieu que la campagne 1916 est triste !
Voici un dessin que je crois bon, le voulez-vous ?
Le trait vous dira ce que je suis et ce que je pense...
Écrivez-moi...
C’est ce qui nous fait croire que nous sommes encore des hommes."
"Dimanche,
Je t'écrirai à partir de demain ma lettre sous forme d'un journal que je ferai quotidiennement.
Ici notre cantonnement - regarde à gauche la petite tente, c'est la cuisine.
Tendresse, Ray"
L'artiste y explique la difficulté à réaliser ses dessins sur la grande pierre lithographique : « Le 21 Février 1916, la 72e division recevait le premier choc de l’offensive allemande devant Verdun. Elle tint quatre jours, subit de fortes pertes et fut évacuée vers l’arrière. C’est au cours de cette randonnée des Hauts-de-Meuse, en Alsace, où nous devions goûter quelques repos, que je fis, au hasard des routes et des cantonnements, cette suite de lithographies. Ces dessins rapidement exécutés dans l’inconfort des déplacements successifs, sont du moins l’expression amère de ce qui constitue un peu de la vie du poilu en campagne. (1er juin 1916, texte de Renefer imprimé en 3e de couverture de l’album Des Hauts-de-Meuse en Alsace).
"Ce qui importe c'est de voir, en regard du récit, une image aussi véridique que lui. C'est, si l'on veut, une illustration parallèle, dont l'idée part du texte, mais dont l'exécution s'appuie sur la réalité. Une telle illustration ne pouvait être faite qu'à cette heure même où la lutte continue, par un artiste au front, ayant continuellement ses références sous les yeux." Noël Clément-Janin, 1918
Le vaguemestre, Coll. Châlons-en-Champagne
En 1944, la fille de Renefer, Raymonde, alors épouse du docteur Jean Auneau, devient agent de liaison pendant la seconde guerre mondiale et membre des FFI (Forces françaises de l'intérieur). Son brassard et une lettre du Cabinet de Charles de Gaulle attestent de ses réelles qualités de courage et d’initiative dans la résistance. Les reportages graphiques et le discours humaniste d'un père ont-ils contribué à forger l'esprit critique de sa fille et faciliter son engagement ? La question mérite d’être posée.
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